Contre l'appropriation privée des chemins ruraux

Une maire sous influence ?

Panneaux au début du chemin de Guissant
Arrêtés affichés sur le portail installé illégalement sur le chemin de Guissant
Les deux barrières sont cadenassées

 Il y a, à Sainte-Céronne (voir image satellite ci-dessous), un bois, le seul bois d’importance de la commune. Le bois de Guissant, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est traversé par deux chemins, le premier est un chemin rural, appartenant à la commune, qui part de la route départementale 273 et conduit à la ferme de Guissant. C’est dans cette ferme, par exemple, qu’avait grandi Madeleine, l’épouse d’André Bansard, notre regretté maire de 1971 à 1995. Le départ du second chemin qui permet de rejoindre Guissant, le "chemin de La Bilhardière", chemin d'exploitation appartenant aux propriétaires riverains, se situe près du Tertre, hameau longé par la route de Soligny. La ferme de Guissant a été acquise récemment par un couple de personnes étrangères au Perche, propriétaires depuis peu d’une ancienne ferme, celle de La Gilbertière, située en face du chemin de Guissant.

La ferme de la Gilbertière a été transformée, certains diront dénaturée, en un gîte assez luxueux (piscines, sauna, hammam, cinéma ? discothèque ?), et rebaptisée assez étrangement "Maison Céronne" puisque notre sainte ne s'y est sans doute jamais aventurée,  cette zone n'ayant probablement pas été défrichée au Ve siècle, époque où le Perche était une vaste forêt impénétrable. Cette enclave parisienne au coeur de la commune attire essentiellement des touristes aisés souhaitant se mettre au vert quelques jours. Le lancement de ce gîte a été favorisé par une couverture médiatique rare par chez nous : quotidiens nationaux, magazines, émission de télévision, donnant de la crédibilité à une sorte de story telling d’un lieu d’abord destiné à accueillir des amis et finalement transformé en commerce mais dans toujours dans une ambiance amicale.

Le récit médiatique semble sur bien des points prendre des libertés avec la réalité. Cette couverture médiatique tend à prouver que les nouveaux venus ne manquent pas de relations dans le petit monde des médias parisiens. Depuis lors, les grosses berlines immatriculées en Ile-de-France errent dans le bourg de Sainte-Céronne à la recherche de “l’hôtel”. Quelque peu narquois mais ayant bon coeur, les Céronnais leur indiquent le bon itinéraire.

La ferme de Guissant, est, elle aussi, destinée à devenir un gîte, comme d’autres parcelles du territoire de Sainte-Céronne, semble-t-il. En effet, selon la rumeur céronnaise, les nouveaux venus "rachèteraient tout à prix d’or” et les gens d’ici commencent à craindre que leur village ne devienne un vaste camp de vacances, où ils n'auraient plus ni place place ni mot à dire.

Propriétaires de la ferme de Guissant, le couple a installé un premier portail fermé par un cadenas pour interdire l’accès à leur propriété. Ce portail se situe au niveau du ruisseau de Saint Mard qui a récemment subi une pollution au sujet de laquelle une enquête est en cours. Mais, en plus de ce portail installé en limite de leur propriété, ces particuliers, comme nous l’avions signalé au maire de Sainte-Céronne dès le 11 août de cette année, ont également installé des portails, eux aussi fermés par des cadenas, sur les chemins ruraux de Guissant et au milieu du chemin d'exploitation de La Bilhardière. Ainsi étaient interdits illégalement le passage des promeneurs sur le chemin de Guissant et celui des exploitants sur celui de La Bilhardière.

Le maire dans cette situation avait l’obligation de faire usage de ses pouvoirs de police pour rétablir la liberté de circulation au moins sur le chemin rural appartenant à la commune. Le point figurant à l’ordre du jour du conseil municipal tenu en septembre, nous pensions de bonne foi qu’elle allait enfin faire le nécessaire et faire respecter les droits des Céronnais et plus largement de tous les citoyens.

Nous le pensions jusqu’à ce que la mairie adresse un courrier électronique à certains habitants de la commune pour les informer que non seulement les portails posés illégalement pourraient rester en place pendant un an, mais qu’en plus, la circulation sur la totalité du chemin de Guissant était désormais interdite pour une durée d’un an, ainsi que sur le chemin de La Billardière à partir du portail. Ces interdictions ne concernent pas les nouveaux propriétaires de Guissant ni ceux qui réalisent des travaux pour eux. De plus, l’interdiction de circuler est levée sur le chemin de Guissant pour les piétons les samedis, dimanches et jours fériés, jours où les clients du gîte “La Maison Céronne” ont l’habitude de s’y promener. Pour justifier l’interdiction de circulation sur ces chemins, le maire invoque "la tranquillité et la sécurité des promeneurs".

Par arrêtés, Madame le Maire autorise donc, à compter du 15 septembre, la pose de portails qu’elle sait être déjà installés depuis plusieurs mois.

Ces quatre arrêtés municipaux n’auraient guère pu être plus favorables s’ils avaient été dictés par les nouveaux propriétaires de Guissant eux-mêmes.

Dans ces circonstances, comment ne pas s’interroger sur les motivations du maire de la commune de Sainte-Céronne ? D’autant qu’il est de notoriété publique qu’en privé Madame le Maire se fait l’avocate dévouée de ces propriétaires très controversés localement. Les Amis de Sainte-Céronne ont donc adressé à Madame le Maire un courriel le 4 octobre dernier pour lui poser quelques questions, occasion pour celle-ci de donner sa version des faits par rapport aux nombreuses suspicions qui courent dans le village : défend-elle les intérêts des Céronnais ou bien des intérêts particuliers ? Sa seule réponse fut de nous menacer d'un dépôt de plainte pour diffamation.

Addendum : le 25 juillet 2023 par arrêté, Madame Dominique Ragot prolongeait jusqu'au 17 août 2024 les privilèges accordés aux propriétaires de Guissant. Et ce bien qu'il semble que les fossés du chemin communal ait été comblés et les talus arrasés pour permettre le passage des véhicules de chantier, transformant le petit chemin sous les bois en grand route.

Barrière sur le chemin communal partant du Tertre vers Guissant

Barrière sur le chemin communal partant du Tertre vers Guissant

Barrière sur le chemin communal partant de la D273 vers Guissant

Barrière sur le chemin communal partant de la D273 vers Guissant

Barrière interdisant l'accès à Guissant, cette fois avec la mention

Barrière interdisant l'accès à Guissant, cette fois avec la mention "accès interdit, propriété privée"

Plan : Guissant, les chemins ruraux, Maison Céronne

Panneaux au début du chemin de Guissant

Arrêtés affichés sur le portail du chemin de Guissant installé en violation du droit de propriété de la commune

 

Extrait du courriel adressé le 11 août 2022 à la mairie de Sainte-Céronne par l'ASC :

"Madame le Maire, Selon les dispositions de l'article L. 161-1 du code rural, les chemins ruraux sont des chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune.

Plusieurs habitants de la commune nous ont alertés au sujet du chemin qui part de la D273 vers le lieu-dit “Guissant” ainsi qu’au sujet de celui allant de Guissant vers le lieu-dit Le Tertre. Ce sont des chemins ruraux appartenant à la commune de Sainte-Céronne-lès-Mortagne. Pourtant sur ces chemins ont été installés récemment des barrières, interdisant le libre passage du public. Vous trouverez en pièce jointe une photographie prise sur le chemin allant vers Guissant.

L'article L. 161-5 du code rural précise que l'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux, ce qui lui donne les moyens juridiques pour faire cesser les troubles qui pourraient mettre en péril cette conservation. À cet égard, le maire est tenu de faire usage de ses pouvoirs de police pour rétablir la liberté de circulation qui se trouverait mise en cause par un particulier dans un intérêt privé.

Nous aimerions savoir quelles démarches vous comptez effectuer pour rétablir la liberté de circulation sur ces chemins."